Un courrier inattendu, une demande qui fait froncer les sourcils : voilà comment Lucie s’est retrouvée face à la phrase redoutée de son propriétaire, lui réclamant une participation à la taxe foncière. Malaise, doute, agacement… Elle pensait pourtant que ce genre de surprise n’était pas au menu de la location. Alors, simple dérive isolée ou pratique tolérée ? Peut-on vraiment demander à un locataire d’assumer la taxe foncière ? Derrière la question, c’est tout un pan de la relation locataire-propriétaire qui se dévoile, pas toujours à l’avantage du moins averti.
Beaucoup se persuadent que la règle ne varie jamais, mais les baux de location, eux, savent cacher des subtilités. Entre clauses habiles et arrangements parfois contestables, la limite entre ce qui se fait et ce qui dépasse les bornes n’a rien d’évident.
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La taxe foncière, un impôt réservé aux propriétaires ?
La taxe foncière concerne toutes les propriétés bâties : appartement, maison, local commercial, garage… Chaque année, l’administration fiscale adresse la douloureuse au propriétaire en titre au 1er janvier, qu’il s’agisse d’un particulier ou d’une SCI. La taxe foncière propriétaire court ainsi pour l’année entière, peu importe si la propriété change de mains en cours de route. C’est simple : celui qui détient le bien le 1er janvier paie, point final.
Le montant varie d’une commune à l’autre, en fonction de la surface, de l’usage – habitation ou activité – et des décisions des collectivités locales, qui fixent le taux chaque année. Ici, la géographie et la politique fiscale locale pèsent lourd. Certains logements neufs, les personnes âgées sous conditions, ou les biens vacants peuvent bénéficier d’une exonération de taxe foncière, preuve que la règle admet quelques exceptions.
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- Il ne faut pas confondre la taxe foncière propriétés bâties avec la taxe d’habitation, qui disparaît progressivement pour les résidences principales.
- Lorsqu’un logement est vendu en cours d’année, vendeur et acquéreur peuvent s’entendre pour partager la note au prorata. Mais, pour l’administration, il n’y a qu’un seul responsable : le propriétaire au 1er janvier.
La logique veut donc que la taxe foncière reste une affaire de propriétaires. Pourtant, dans certains contrats, surtout côté commerce, la question de la répartition surgit, et la donne peut changer.
Peut-on lui aussi demander au locataire de payer la taxe foncière ?
Le débat revient régulièrement sur la table entre bailleurs et locataires. Pour une location d’habitation, la règle est sans ambiguïté : impossible d’imposer au locataire le paiement de la taxe foncière. Même en glissant une clause dans le bail, le propriétaire ne pourra pas légalement réclamer cet impôt. Seule la fameuse taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) peut être refacturée à l’occupant.
Le décor change radicalement pour un bail commercial ou professionnel. Ici, la liberté contractuelle s’applique. Il est tout à fait courant que le contrat stipule que le locataire prend à sa charge tout ou partie de la taxe foncière. Les contrats le précisent, noir sur blanc : dans un local commercial, c’est souvent le preneur qui paie, si la clause le prévoit. Pour une SCI propriétaire, c’est même devenu la norme, à condition que le bail ne laisse place à aucune ambiguïté.
- En location d’habitation : la taxe foncière n’est jamais à la charge du locataire.
- En bail commercial ou professionnel : le locataire peut se voir confier la taxe foncière, si une clause du bail le précise.
Tout se joue sur la rédaction du bail. Si ce dernier ne dit rien, la charge reste au propriétaire. Avant de signer, mieux vaut lire chaque ligne, car une phrase mal comprise peut transformer un détail en tracas coûteux.
Ce que dit la loi sur la répercussion de la taxe foncière dans le bail
La loi ne laisse pas place au doute : la taxe foncière est une charge qui reste sur les épaules du propriétaire lorsqu’il s’agit de louer un logement à usage d’habitation. Depuis la loi du 6 juillet 1989, impossible de transférer ce fardeau sur le locataire, même avec un bail meublé ou sous le régime LMNP. Seule la taxe d’enlèvement des ordures ménagères fait exception, car elle figure dans la liste officielle des charges récupérables.
En ce qui concerne les locaux commerciaux, la loi Pinel a secoué les habitudes. Depuis 2014, bailleur et locataire doivent s’entendre explicitement sur la répartition des impôts et charges dans le contrat. Le propriétaire peut donc, si le bail l’autorise, demander au locataire de rembourser la taxe foncière. Cette flexibilité s’arrête aux portes de la location d’habitation.
- Pour un logement : la taxe foncière reste la responsabilité du propriétaire, sans discussion.
- Pour un commerce : le bail peut prévoir la répercussion sur le locataire.
Quant à la taxe d’habitation, elle ne prend pas le relais : elle s’appliquait à l’occupant, mais sa suppression progressive recentre le débat sur la seule taxe foncière. Le propriétaire demeure le seul concerné dans les baux résidentiels, à moins d’un bail commercial qui précise le contraire.
Éviter les litiges : conseils pratiques pour propriétaires et locataires
La taxe foncière a le don d’attiser les crispations entre bailleurs et locataires, alors que la règle est limpide pour les logements résidentiels : le locataire n’a pas à payer cet impôt. Pour éviter les quiproquos, il est indispensable de soigner la rédaction du bail et de passer chaque clause au peigne fin.
Clarifier la répartition des charges permet de prévenir bien des désaccords. Il est judicieux d’adresser au locataire l’avis de taxe foncière séparément de celui des charges habituelles, afin d’éviter toute confusion avec la TEOM, la seule part récupérable en location d’habitation.
- Réalisez un état des lieux rigoureux à l’entrée et à la sortie, surtout en cas de vente ou de changement de propriétaire en cours d’année.
- Prenez les devants : expliquez, dès la première visite, que la taxe foncière ne concerne que le bailleur (hors bail commercial).
Pour une location commerciale, chaque élément de fiscalité doit être détaillé dans le contrat : taxe foncière, taxe sur les bureaux, frais d’entretien. L’imprécision ouvre la porte à des conflits inutiles. Les professionnels de l’immobilier insistent sur la nécessité de tout consigner noir sur blanc.
Demander l’avis d’un spécialiste pour rédiger ou relire le bail réduit considérablement les risques de malentendus autour du paiement de la taxe foncière. Pour une SCI ou lors d’un achat avec locataire en place, c’est un réflexe à adopter. Une gestion régulière des justificatifs et une communication limpide restent l’arme la plus efficace contre les litiges, car rien ne vaut la clarté avant la signature pour éviter les mauvaises surprises derrière la boîte aux lettres.